Un contrat de vente internationale mentionnant uniquement « FOB » sans préciser le port d’embarquement expose les parties à des incertitudes juridiques majeures. Plusieurs tribunaux ont déjà statué sur des litiges où l’absence de détails sur l’Incoterm choisi a entraîné des pertes financières importantes.
Certains pays appliquent des versions différentes des Incoterms ou imposent des usages locaux spécifiques, ce qui complique les transactions. L’évolution régulière de ces règles oblige les entreprises à se tenir informées pour éviter des risques de non-conformité et des surcoûts imprévus.
Incoterms : comprendre leur rôle clé dans le commerce international
Les Incoterms, ces standards forgés par la Chambre de commerce internationale (CCI/ICC), dessinent depuis près d’un siècle le terrain de jeu du commerce mondial. Leur vocation ? Éclaircir les responsabilités de chaque partie, apaiser les conflits et simplifier les négociations. C’est le langage partagé par tous, présent dans chaque contrat de vente international : un repère pour fixer la livraison, le transfert des risques et la répartition des frais.
Ce dispositif encadre uniquement les biens matériels. Les services ou les droits immatériels restent en dehors de leur champ. Depuis la publication de la version Incoterms 2020, plus de 120 pays, dont la France et ses voisines européennes, s’alignent sur ces règles révisées chaque décennie. Les pratiques évoluent, le commerce se transforme, les Incoterms s’adaptent. Bientôt, l’édition Incoterms 2023 focalisera l’attention des professionnels.
Leur effet ne s’arrête pas à la livraison. Les Incoterms définissent aussi le transfert des risques, l’obligation d’assurance, la gestion des frais de transport, les formalités douanières et les documents à fournir. L’intention de la CCI/ICC : offrir aux entreprises un cadre solide pour chaque étape du voyage des marchandises, depuis le départ jusqu’au point d’arrivée. Face à la diversité des situations et l’intensification des échanges, les Incoterms s’imposent comme la règle du jeu pour éviter les angles morts dans le commerce international.
Quels sont les différents types d’Incoterms et comment les distinguer ?
Pour s’y retrouver, il est utile de distinguer les onze Incoterms 2020 selon leur mode de transport. Certains couvrent tous les modes, d’autres s’appliquent uniquement au maritime et au fluvial. Cette séparation structure la distribution des responsabilités et des risques.
Voici la répartition :
- Pour tous modes de transport : EXW (Ex Works), FCA (Free Carrier), CPT (Carriage Paid To), CIP (Carriage and Insurance Paid To), DAP (Delivered At Place), DPU (Delivered at Place Unloaded), DDP (Delivered Duty Paid).
- Pour transport maritime et fluvial : FAS (Free Alongside Ship), FOB (Free On Board), CFR (Cost and Freight), CIF (Cost, Insurance and Freight).
Chaque terme impose une division fine des rôles. EXW laisse presque tout le poids à l’acheteur, qui doit venir récupérer la marchandise chez le vendeur. À l’autre bout, DDP confie au vendeur la gestion de la livraison jusqu’au point final, dédouanée et tous frais acquittés. Entre ces deux extrêmes, on retrouve un éventail de solutions, selon l’équilibre souhaité entre les parties.
Deux cas particuliers méritent d’être soulignés : CIP et CIF imposent au vendeur de souscrire une assurance au bénéfice de l’acheteur, mais avec des niveaux de couverture qui diffèrent. DAP, très utilisé dans le e-commerce, prévoit une livraison à l’adresse convenue, sans que le vendeur doive décharger la marchandise. DPU, lui, ajoute le déchargement sur le site d’arrivée.
La philosophie des Incoterms, au fond, c’est d’ajuster la ligne de partage du risque et du coût, en fonction des choix stratégiques de chaque entreprise. Exportateurs et importateurs doivent s’approprier ce mécanisme pour sélectionner le terme qui colle au mieux à la réalité de leur opération.
Bien choisir ses Incoterms pour sécuriser ses échanges internationaux
Adopter un Incoterm adapté revient à orchestrer précisément la distribution des risques, coûts et démarches administratives entre vendeur et acheteur. À chaque étape du transport, la règle ICC précise qui doit fournir l’assurance, qui prend en charge la douane, qui règle la TVA ou qui s’occupe des documents nécessaires. Parfois, une simple imprécision dans le contrat suffit à déplacer la responsabilité d’une partie à l’autre.
Le choix ne doit rien laisser au hasard. Il dépend de la nature des marchandises, de l’organisation logistique du vendeur, de la capacité de l’acheteur à organiser la suite du transport, et aussi des règles du pays de destination. Prenez deux situations concrètes : un fabricant industriel qui livre des équipements lourds en Asie n’optera pas pour le même Incoterm qu’un distributeur en ligne qui expédie de petits colis à travers l’Europe. EXW place quasiment tout le fardeau sur l’acheteur, tandis que DDP transforme le vendeur en chef d’orchestre de la livraison, formalités douanières comprises.
Pour verrouiller la répartition des obligations, il est indispensable de mentionner explicitement l’Incoterm retenu, suivi du lieu précis (comme « DAP, entrepôt Paris »), à la fois dans le contrat et sur la facture commerciale. Omettre ce point, c’est s’exposer à des conflits sur la gestion d’un sinistre ou d’une dépense inattendue. Avec les Incoterms, la priorité n’est pas la neutralité, mais la clarté et la sécurité contractuelle.
La maîtrise des Incoterms, c’est l’assurance d’un commerce international maîtrisé, où chaque acteur sait exactement où commence et où s’arrête sa responsabilité. D’un port à l’autre, d’un contrat à l’autre, la précision du terme choisi dessine la frontière entre sérénité et risque. À chacun de s’en saisir, pour ne pas laisser le hasard décider à sa place.


